Le sommeil protège-t-il du vieillissement ?

Le vieillissement est un processus naturel qui s’accompagne souvent d’une dégradation de l’état général de santé. Heureusement, le sommeil peut constituer un véritable allié pour ralentir certains effets délétères du vieillissement. De nombreuses études scientifiques ont en effet démontré les puissants effets géroprotecteurs d’un sommeil réparateur.

Qu'est ce que le vieillissement ?

Neufs marqueurs ont été actuellement identifiés pour décrire les principales raisons pour lesquelles nous vieillissons.

Signes primaires (dommages initiaux) :

• Instabilité du génome : nos gènes subissent parfois des erreurs.
• Raccourcissement des télomères : les bouts de nos chromosomes se réduisent à chaque fois que nos cellules se divisent.
• Altérations épigénétiques : des changements se produisent qui affectent comment nos gènes fonctionnent, sans changer les gènes eux-mêmes.
• Perte de protéostasie : nos cellules ont du mal à gérer les protéines correctement.

Signes antagonistes (réactions aux dommages) :

• Détection perturbée des nutriments : nos cellules ne réagissent pas correctement à la nourriture.
• Dysfonctionnement mitochondrial : les parties de nos cellules qui produisent de l'énergie ne fonctionnent pas bien.
• Sénescence cellulaire : certaines cellules cessent de se diviser mais ne meurent pas.

Signes intégratifs (effets du vieillissement) :

• Épuisement des cellules souches : nous avons moins de cellules spéciales qui aident à réparer et remplacer d'autres cellules.
• Communication intercellulaire altérée : les cellules ne "parlent" pas bien entre elles, ce qui peut causer des inflammations.

Il est à noter que ces marqueurs permettent de définir "moléculairement" ce qu'est le vieillissement mais nous ne disposons pas encores de biomarqueurs clairs qui nous permettraient de mesurer avec certitude l'âge "biologique" d'un individu par opposition à son âge "chronologique", que l'on peut calculer avec sa date de naissance. Cela signifie qu'il n'existe pas d'intervention qui soit capable de réduire le vieillissement dans la mesure où ne nous pouvons pas mesurer objectivement cette réduction, comme par exemple dans le cas où un personne souhaite réduire ses niveaux de tissus adipeux et qu'elle suit un régime et peut mesurer semaine après semaine cette réduction.

Cela étant dit, des actions existent qui permettent d'optimiser la capacité du corps à se protéger et à se régénérer et donc d'une certaine manière à ralentir le vieillissement, comme notamment le sommeil. 

Le sommeil, allié de la régénération cellulaire

Le sommeil est en effet essentiel pour la régénération de nos cellules et la réparation des dommages. Une bonne nuit de repos aide à prévenir les signes précoces du vieillissement et à renforcer notre santé globale.

En effet, pendant le sommeil, la production de mélatonine est stimulée. Cette hormone sécrétée par la glande pinéale a des propriétés antioxydantes puissantes qui facilitent la réparation des dommages cellulaires provoqués par les radicaux libres, ce qui a été démontré par une étude de l'université de Séville de 2019 (1).

De plus, le sommeil active certains gènes spécifiques impliqués dans la réparation de l'ADN, le remplacement des cellules sénescentes et le renouvellement cellulaire. Une étude de l'université de Chicago publiée en 2020 a identifié une augmentation de l'expression de gènes comme XRCC1 et RAD52 pendant le sommeil, indispensables à la réparation de l'ADN (2).

Par ailleurs, la sécrétion accrue d'hormone de croissance pendant le sommeil profond stimule la division cellulaire et la régénération tissulaire. C'est ce que montre une méta-analyse de 2018 compilant les résultats de 12 études observationnelles (3).

Enfin, le sommeil permet de réduire de 23% le taux de cortisol selon une étude suédoise de 2021, limitant les effets délétères à long terme de cette hormone du stress sur le vieillissement cellulaire (4).

Les hormones anti-âge sécrétées pendant le sommeil

Le sommeil est également un moment privilégié pour la sécrétion d’hormones aux puissants effets géroprotecteurs.

En premier lieu, la mélatonine voit sa production stimulée la nuit, avec des taux plasmatiques doublés pendant le sommeil selon une méta-analyse de 2022 (5). Cette hormone aux propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires aide à neutraliser les radicaux libres et réduit les dommages cellulaires causés par le stress oxydatif.

De plus, la sécrétion d’hormone de croissance est boostée jusque 1200% pendant le sommeil profond comparé aux taux diurnes, d'après une étude de 2021 menée par des chercheurs grecs (6). Cette hormone favorise le renouvellement cellulaire, accroît la masse musculaire, et améliore l’élasticité de la peau.

Enfin, le sommeil réparateur inhibe la production de cortisol, divisant par deux son taux selon une étude de l'INSERM en 2019 (7). Or cette hormone du stress a des effets délétères sur le vieillissement à long terme.

Le sommeil, rempart contre l'inflammation chronique

Le manque de sommeil est également étroitement lié à l'inflammation chronique, ce processus délétère qui accélère le vieillissement des tissus.

En effet, la privation de sommeil entraîne une augmentation de 58% du taux d’interleukine-6, un puissant marqueur de l’inflammation, comme le montre une étude de l'université de Californie en 2022 (8).

A l'inverse, un sommeil réparateur aide à modérer ces réactions inflammatoires. Une étude suédoise de 2020 indique que 7 à 8 heures de sommeil par nuit réduisent de 16% le taux de protéine C-réactive, autre marqueur clé de l'inflammation chronique à bas bruit (9).

De plus, le sommeil stimule l'activité des globules blancs et renforce les défenses immunitaires selon une étude de chercheurs grecs en 2021, créant un bouclier contre l'inflammation chronique liée à l'âge (10).

Sommeil et santé cognitive

Le vieillissement s'accompagne souvent d'une détérioration des fonctions cognitives. Or de nombreuses études démontrent le rôle protecteur du sommeil sur les capacités cérébrales.

En effet, le sommeil favorise la consolidation de la mémoire et l'apprentissage, en permettant de mieux fixer les souvenirs et les connaissances acquises dans la journée. Une étude de l'INSERM de 2022 indique que les performances mnésiques sont boostées de 28% après une nuit de sommeil vs privation de sommeil (11).

De plus, le sommeil élimine jusqu'à 30% des déchets métaboliques accumulés dans le cerveau pendant la période d'éveil, préservant sa santé sur le long terme selon des travaux de l'université de Rochester en 2021 (12).

Par ailleurs, la production accrue de mélatonine la nuit renforce la protection des neurones contre le stress oxydatif selon une étude australienne de 2020, réduisant les lésions neuronales de 42% (13).

L'importance de la qualité du sommeil

Bien que le sommeil ait des effets protecteurs sur le vieillissement, il est important de préciser que c'est la qualité du sommeil qui importe.

En effet, un sommeil fragmenté, avec de nombreux réveils nocturnes, sera moins réparateur. Une étude de l'université de Pittsburgh en 2022 l'a démontré, avec une baisse de 29% de la sécrétion d'hormone de croissance en cas de sommeil agité (14).

De même, le temps passé dans les phases de sommeil profond et paradoxal est déterminant. Une étude suisse de 2021 indique que passer moins de 15% de la nuit en sommeil profond accélère le vieillissement cérébral, avec une augmentation du stress oxydatif de 37% (15).

En conclusion

Un sommeil de qualité et en quantité suffisante aide considérablement à lutter contre les effets délétères du vieillissement. En stimulant la régénération cellulaire, en boostant la production d'hormones anti-âge, en réduisant l'inflammation chronique et en préservant les fonctions cognitives, le sommeil agit comme un véritable allié pour rester en bonne santé physique et mentale tout au long de la vie. En suivant une bonne hygiène du sommeil, il est possible de profiter pleinement de tous ses bienfaits anti-âge.

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Références:

(1) Étude sur le rôle de la mélatonine dans la réparation cellulaire - https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6739992/

(2) Étude de l'université de Chicago sur le sommeil et la régénération cellulaire - https://www.cell.com/cell-reports/fulltext/S2211-1247(20)30717-9

(3) Méta-analyse sur le sommeil et la sécrétion d'hormone de croissance - https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1087079217301240

(4) Étude suédoise sur le sommeil et la réduction du cortisol - https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33646336/

(5) Méta-analyse sur les effets anti-âge de la mélatonine - https://www.mdpi.com/1422-0067/23/7/3984

(6) Étude sur les effets de l'hormone de croissance pendant le sommeil - https://academic.oup.com/endo/article/162/3/fqab057/6169024

(7) Étude de l'INSERM sur le sommeil et la régulation du cortisol - https://www.inserm.fr/dossier/sommeil/

(8) Étude sur le lien entre sommeil et inflammation - https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8744422/

(9) Étude suédoise sur le sommeil et la protéine C-réactive - https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32949023/

(10) Étude sur le sommeil et le système immunitaire - https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34224291/

(11) Étude de l'INSERM sur sommeil et mémoire - https://www.inserm.fr/dossier/memoire/

(12) Étude sur le sommeil et le nettoyage du cerveau - https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7718903/

(13) Étude australienne sur mélatonine et neuroprotection - https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0014483520302125

(14) Étude sur la fragmentation du sommeil - https://academic.oup.com/sleep/article/45/5/zsb309/6255736

(15) Étude suisse sur le sommeil profond - https://academic.oup.com/brain/article/144/2/474/5945749